La vie de la ruche
La ruche Dadant est le format le plus couramment rencontré dans les ruchers de nos régions. Elle est constituée d’un corps de ruche en pin recouvert d’une peinture d’aluminium pour protéger le bois. A l’intérieur, sont placés 10 cadres en bois munis d’une feuille de cire gaufrée, le motif des alvéoles hexagonales est déjà imprimé pour aider les ouvrières à les construire de façon régulière et surtout pour gagner du temps car la fabrication d’un kilo de cire nécessite la consommation de 10 kg de miel ! Au-dessus du corps de ruche, un nourrisseur horizontal permet à l’apiculteur de nourrir ses abeilles avec du sirop de sucre à l’automne et au printemps (les abeilles peuvent y accéder par l’intérieur de la ruche). Tous les mets raffinés stockés à l'intérieur de la ruche attirent la convoitise de divers animaux affamés comme les musaraignes, les lézards, les guêpes et les fourmis. C’est pourquoi une grille en métal est placée à l’entrée de la ruche. De plus, les ouvrières peuvent rentrer sans bousculade et se faire inspecter par les gardiennes.
Au moment de la miellée, on installe une hausse sur le dessus du corps de ruche. La hausse est constituée de 9 demi-cadres, un cadre de moins que le corps pour permettre aux ouvrières de faire des opercules plus épais sur les alvéoles emplies de miel. Cela facilite l’extraction du miel. Pour éviter que la reine ne transforme la hausse en pouponnière, ce qui rendrait le miel impropre, l'apiculteur place une grille à reine au dessus du corps de ruche. En procédant ainsi, l’apiculteur profite du comportement d’amassage des abeilles, lesquelles stockent beaucoup plus de miel que leur besoin réel dans la mesure où les races ont été sélectionnées en ce sens au détriment d’autres qualités comme la douceur, la tenue de cadre, la résistance aux maladies et la propreté des locaux. En présence de la hausse, compartiment supplémentaire inaccessible à sa seigneurie, les ouvrières vont y stocker le nectar qui sera travaillé, avalé, recraché, échangé par trophallaxie et mélangé aux enzymes digestives. Sa teneur en eau va ensuite progressivement s’abaisser par évaporation dans l’alvéole jusqu’à une valeur seuil d'environ 18% qui servira de signal pour fermer l'alvéole d'un l’opercule reconnaissable par son aspect plissé. Ce nectar transformé devient du miel. Il est intéressant de noter que chaque ouvrière effectue les différentes tâches en fonction de son âge, c’est-à-dire en fonction de son état physiologique qui correspond à la maturation des différents organes. Par exemple, les ouvrières cirières sont de jeunes abeilles âgées d’environ 10 jours qui produisent des paillettes de cire sur la face ventrale de leur abdomen, les décollent, les malaxent, chauffent la cire gaufrée déjà fournie et l’étirent pour former les alvéoles. Tout est organisé à la perfection : le centre du cadre est réservé à la ponte alors qu'en périphérie on trouvera les réserves de pollen (qui servent de nourriture aux larves) et de miel (pour nourrir les larves et les ouvrières).
On observe ensuite une distribution différente des denrées en fonction de « l’appartenance sociale » : La reine profitera de la gelée royale tout au long de sa vie larvaire (soit 5 jours) et sa vie adulte (4 à 5 ans), même si les apiculteurs professionnels préfèrent remérer tous les 2 ans pour des raisons de productivité.
Les larves de mâles et d’ouvrières ont droit à partir du 4ème jour à une mixture miel/pollen, le régime des mâles semble toutefois plus riche en pollen. Le pollen récolté doit être d’excellente qualité, riche en protéines, mais également le plus varié possible.
Les grains de pollen récoltés par les butineuses sont rassemblés sous forme de pelotes sur les P3 des ouvrières grâce à la régurgitation d’un peu de nectar du jabot. Les pelotes de pollen sont ensuite décrochées des corbeilles grâce à une épine « décroche pelote » située sur la 2ème paire de patte, puis elles sont stockées à l’intérieur des alvéoles, tassées par la tête des ouvrières, mélangées à un peu de salive riche en enzymes. Il s’ensuit une fermentation lactique des sucres du nectar présents grâce à la microflore intestinale de l’abeille, permettant la conservation (par acidification du milieu) et augmentant le pouvoir nutritif du pollen. On obtient du « pain d’abeille ». S'il le souhaite, l’apiculteur peut commercialiser les pelotes en plaçant une trappe à pollen à l’entrée de la ruche : les abeilles sont forcées de traverser un tamis étroit et les pelotes se décrochent d’elles-mêmes.
La récolte du miel a lieu par beau temps généralement au mois de juillet si l’on fait qu’une seule récolte annuelle, ou à la fin de chaque floraison : en mai pour le Colza, juin pour le Robinier faux-acacia, juillet pour le Châtaignier, août pour le Tournesol. La veille de la récolte, l'apiculteur place entre le corps de ruche et la hausse un plateau « chasse abeilles » (plateau qui ne peut être traversé par les abeilles que dans un seul sens) de sorte que les abeilles puissent le traverser du haut vers le bas (et non du bas vers le haut : faites attention de l'installer dans le bon sens !). Comme chaque nuit les ouvrières descendent dormir au chaud après avoir longuement travaillé à l’étage, le lendemain la hausse est quasiment vide d’abeilles. L'apiculteur prendra garde aussi de ne pas laisser le « chasse abeilles » plusieurs jours car elles auront vite fait de trouver une solution pour détourner le sens unique. L’extraction se fait après avoir découpé les opercules au couteau. Pour cela, on place les cadres de hausse dans l’extracteur (une grosse centrifugeuse électrique ou manuelle) de façon à ce que le miel soit éjecté sur les parois et coule au fond de l'extracteur. A l’ouverture du robinet, le miel sera filtré dans une passoire fine puis mis en pot.
Pour en savoir plus
- CLEMENT H. et coll., Le traité rustica de l'apiculture, Rustica éditions, 2011.
- TARDIEU V., L'étrange silence des abeilles, Belin Pour La Science, 2009.
- TAUTZ J., L'étonnante abeille, DeBoeck, 2009.
Elodie Carémoli, apicultrice. Mai 2012.
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